21 avril 2009

Danshui sous la pluie

Taipei, jeudi 12 juin : soleil, maximales : 36, minimales : 32.

Sous un grand ciel sans nuage inondé de lueur flomboyante de soleil du midi, autour du campus, les passants, étudiants en majorité, à qui la sueur perle au front, fourmillent ici et là en quête de la nourriture. En un clin d'oeil, les nuages gros et gris d'origine inconnue, se rassemblent puis nous abattent à l'improviste avec une averse, sans laisser le temps de réaction. Chance pour ceux qui se munissent d'ombrelle, ils ne s'exposent pas à ces attaques. Ceux qui comptent sur la météo pressent le pas à la recherche d'un pépin abandonné ou d'un abri provisoire. Il y a aussi des gens qui, quoi que ce soit bien rare, décrochent de son poignet ou sortent de son sac le pébroc et l'ouvrent tout en prenant leur temps. Ils arrondissent le mouvement de ses jambes comme pour parader sa prérogative de cette flânerie nonchalante et sa connaissance sur le tempérament capricieux de cette commune pluvieuse.

Le manteau à capuchon serait plus utile que le parapluie en hiver pour les Européens. Sous la pluie ils arborent un air détaché comme si rien ne s'était passé. Le riflard serait pour eux un objet de trop à la main. Puis, ses baleines les embarrassent dans la foule et sa longueur les force, pendant toute la promenade, à suspendre l'avant-bras. Ce dispositif ne nous protège pas que de la pluie mais aussi du croisement des regards embarassants qu'on essaie d'éviter. À l'abri de cet hémisphère, on est privé des règles de politesse imposantes nous exigeant de sourire aux ceux qui nous embrouillent. Une paix absolue débarque à la suite de la chute de pluie et l'ouverture du parapluie. Cet espace personnel nous éloigne du monde extérieur, des contacts avec l'autrui, du paysage nébuleux. Tant mieux, aujourd'hui on en a besoin. Laissez-moi en paix !

Dans cinq minutes

- Oui, je suis en route. J'arriverai dans cinq minutes !
Il attrapa le trousseau de clés dans le vide-poche, ouvrit la porte et la referma à clé. Un vrombissement au démarrage suivi du claquement de portière. Sur le cadran carré de montre numérique de sa Peugeot flottèrent des chiffres aux contours nets : 8:54. Rencard à 9 heures précises devant un café situé à plus de 30 minutes en voiture de chez lui.
Dans cinq minutes. Ni plus ni moins. Comme si ce n'était pas la peine de faire un appel pour prévenir son retard de 4 minutes. Et celui de 6 minutes impatienterait son partenaire et risquerait même de le filer. Faire faux bond. C'est hors de question. Mis par un sacré menteur égoïste, ce terme fait poireauter le rendez-vous, tourmenté perpetuellement de l'attente de la fin de ce cercle infini aussi bien qu'écransant. Continuellement prêt à retarder la rencontre sous le prétexte pareil, le bourreau, assis paisiblement dans son siège, prend le plaisir dans la course en slalom.
À neuf heures et demi, il arriva.